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Covid-19 : La cartographie à court terme des questions d’emploi et de politique sociale de l’OCDE

L’OCDE a publié un nouveau portail web en réponse à l’épidémie du virus Covid-19, « Lutter contre le coronavirus – Contribuer à un effort mondial », qui comprend une analyse politique utile et une liste de solutions politiques à court terme pour atténuer l’impact ...

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L’OCDE a publié un nouveau portail web en réponse à l’épidémie du virus Covid-19, « Lutter contre le coronavirus – Contribuer à un effort mondial », qui comprend une analyse politique utile et une liste de solutions politiques à court terme pour atténuer l’impact de la crise.
Dans ce qui suit, le TUAC propose une lecture syndicale de la réponse sur l’emploi et la politique sociale.

Il est évident à ce stade que l’urgence Covid-19 frappe durement tous les travailleurs – certains en termes d’accès aux congés de maladie, aux allocations de chômage ou de sécurité sociale, d’autres en termes d’intensification de la charge de travail et de risque de contagion.
Nombreux sont ceux qui craignent de perdre totalement leur emploi ou qui ont déjà été licenciés.
Les personnes occupant des emplois temporaires, occasionnels ou précaires sont confrontées à des risques encore plus importants.
L’OCDE a publié la semaine dernière une cartographie des politiques sociales et de l’emploi.
Aider les personnes et les entreprises à faire face au virus Covid-19 : Options for an immediate employment and social-policy response »(lien) est un recueil de ce que les gouvernements ont fait au cours des deux dernières semaines.
Ce document met en évidence les lacunes existantes en matière de droits statutaires et d’accès aux congés et à l’indemnisation pour différents types de travailleurs.
Il applique des catégories très similaires à celles du briefing du TUAC sur les réponses politiques dans sa section sur le marché du travail et évoque certains des exemples couverts par notre cartographie syndicale.
L’OCDE reconnaît la pression sur les revenus des ménages et le risque d’un choc de la demande.
C’est une bonne chose.
Malheureusement, elle ne recommande jamais explicitement la coordination avec les partenaires sociaux et le dialogue social en tant que mécanisme de pilotage ou de gouvernance.
À ce stade, le document n’aborde que des solutions politiques à court terme.
Les recommandations politiques en tant que telles restent rares.
En bref, il semble proposer des pansements pour faire face à une pandémie nécessitant des greffes de plusieurs organes.
Cela tient peut-être davantage aux réponses apportées jusqu’à présent par les gouvernements qu’à l’évaluation de l’OCDE elle-même, qui est très complète et illustrative.

À l’avenir, les lacunes suivantes devraient être corrigées dans une prochaine version de l’OCDE :
  • Si les conventions collectives ou les syndicats sont mentionnés ici et là (en vue d’accords ou en tant que piliers de régimes existants qui doivent maintenant être assouplis), le document n’évoque pas le rôle spécifique des partenaires sociaux et ne recommande jamais le dialogue social en tant que mécanisme de pilotage ou de gouvernance.
  • En examinant certaines des lacunes de la couverture, le document ne prend pas position sur les problèmes sous-jacents concernant les droits et l’augmentation des modalités de travail flexibles et atypiques (également en raison des réformes structurelles induites par la crise passée).
  • Tout en discutant des programmes d’emploi à court terme qui sont importants pour prévenir le chômage de masse, le document n’aborde pas les leçons tirées de la crise précédente pour prévenir l’utilisation excessive des programmes STW et les licenciements après l’état d’urgence.
    Tout cela en gardant à l’esprit que les institutions du marché du travail sont considérablement plus faibles aujourd’hui qu’elles ne l’étaient en 2008.
    Le TUAC appelle l’OCDE à exprimer sa préférence pour des régimes de chômage de courte durée limités et transitoires.
  • Aucune mesure de santé et de sécurité au travail n’est évoquée – étant donné le risque de contagion, en particulier pour les personnes qui se trouvent en première ligne, il convient d’approfondir la question.
  • La discussion sur les mesures pour les travailleurs des secteurs essentiels est trop courte – par exemple en ce qui concerne leur sécurité, leur charge de travail accrue, leurs responsabilités en matière de soins, etc.
    Cela est également dû au fait que les gouvernements ont été plus lents à réagir, alors que de nombreux accords avec les syndicats voient le jour.
  • Il convient de poursuivre la discussion sur le financement des mesures évoquées en fonction du système national, mais aussi en termes d’horizon temporel, dans la perspective d’une période d’urgence plus longue.
La principale question que tout le monde se pose est donc de savoir comment les politiques peuvent être étendues et adaptées à tous les travailleurs sur un horizon temporel plus long et avec un financement adéquat.
Le TUAC a attiré l’attention sur le fait que de nombreuses mesures proposées dans les pays de l’OCDE sont régressives par nature et qu’elles n’atteindront pas les catégories de travailleurs les plus exposées ou ne seront pas adaptées aux besoins professionnels des secteurs et de leurs chaînes d’approvisionnement :
  • Les professionnels de la santé qui combattent le coronavirus en première ligne, les travailleurs de l’industrie, du commerce de détail, de la logistique (y compris les transports) et les autres personnes qui n’ont pas la chance de travailler à domicile et qui ne bénéficient pas d’une protection efficace de leur santé et d’une réglementation du temps de travail alors qu’ils sont confrontés à des rythmes de travail intensifiés ;
  • En général, le télétravail implique une capacité informatique et une connectivité qui sont souvent hors de portée des PME et des régions souffrant de fracture numérique, ce qui exclut une grande partie des travailleurs ;
  • Les employés des secteurs du transport, de l’alimentation, du tourisme et de l’hôtellerie, qui coïncident souvent avec les travailleurs les moins bien payés et les moins protégés, voient leur emploi menacé.
  • Les travailleurs indépendants et précaires qui ne bénéficient pas d’une couverture adéquate en matière de congés de maladie et de congés temporaires.

La note d’information de l’OCDE donne une vue d’ensemble des mesures politiques prises jusqu’à présent, regroupées en cinq sections.
Plusieurs aspects du document soulignent la nécessité d’optimiser davantage les réponses politiques :

Garantir l'emploi des travailleurs et la viabilité économique des entreprises

Dans « Securing workers’ jobs and the economic viability of firms », la première solution évoquée est celle des régimes de travail à court terme : la réglementation allemande Kurzarbeit qui a été étendue aux travailleurs temporaires (« pour prévenir la segmentation du marché du travail ») avec une couverture publique de 100 % de l’assurance sociale (contre 50 % en 2008/9) ; l’accord des partenaires sociaux danois, les extensions réalisées en Corée, l’unification des régimes en France et l’introduction d’un régime de licenciement temporaire au Portugal.
L’OCDE plaide en faveur d’une adoption rapide de ces mesures et donc d’un assouplissement des exigences, y compris des conventions collectives existantes.
Elle met en garde contre le risque de subventionner indûment des emplois qui resteraient superflus après la crise. Le TUAC demande à l’OCDE d’exprimer sa préférence pour des régimes de STW limités et transitoires.
Une discussion plus approfondie serait nécessaire sur les pays où de telles options politiques sont limitées, mais où il est nécessaire d’éviter les licenciements et un assouplissement de la protection de l’emploi.
En outre, les critères de conditionnalité relatifs à l’emploi et aux salaires doivent être liés au soutien des entreprises privées.
Comme le mentionne l’OCDE, la France et l’Italie ont introduit des limitations aux licenciements économiques pour forcer les entreprises à utiliser les régimes élargis de STW.
Le document fait brièvement référence à la nécessité de doter le secteur essentiel en personnel et recommande d’assouplir les règles d’embauche mais aussi de licenciement – le second point semble inutile.
Il n’est pas nécessaire d’assouplir les règles de licenciement.
Cela serait préjudiciable à la sécurité de l’emploi au lendemain de la crise.
Dans l’ensemble, en abordant ce sujet, l’OCDE pourrait s’attaquer davantage au manque de protection de l’emploi pour les travailleurs atypiques et indépendants.
Lorsque l’OCDE commencera à discuter de l’après-crise, les obligations de redéploiement, les clauses de conditionnalité et la nécessité de revenir sur certaines mesures d’assouplissement devront être au premier plan.
Il en va de même pour le renforcement des institutions du marché du travail afin de prévenir la segmentation du marché du travail.

Soutenir financièrement les entreprises touchées par une baisse de la demande

En « apportant un soutien financier aux entreprises touchées par une baisse de la demande », il semble probable que toutes les entreprises connaîtront une baisse de la demande.
Le soutien des pouvoirs publics est inévitable, mais il ne doit pas être inconditionnel.
Les aides publiques, les subventions, les allègements fiscaux sont des privilèges de la confiance publique, qui permettent d’opérer dans l’économie post-pandémique.
En contrepartie de ce privilège financier, les bénéficiaires de capitaux soutenus par le gouvernement devraient être invités à fournir des preuves de leur engagement en faveur de la cohésion et de la stabilité sociales, y compris des accords sectoriels avec les travailleurs, les représentants des travailleurs et les syndicats.

Fournir une aide au revenu aux personnes qui perdent leur emploi ou leur revenu d'indépendant

Dans la section « Fournir une aide au revenu à ceux qui perdent leur emploi ou leur revenu d’indépendant », des points importants sont soulevés sur la sécurisation des revenus des ménages.
Le document regroupe les pays en fonction du taux de couverture des travailleurs standard en cas de perte d’emploi, ce qui montre des différences significatives en matière de protection.
Il souligne le fait que les travailleurs atypiques ont 40 à 50 % de chances en moins de bénéficier d’une aide et, s’ils en bénéficient, celle-ci est inférieure à celle des travailleurs standard.
Il évoque ensuite les mesures récentes d’extension de la couverture, les prestations du filet de sécurité sociale sous condition de ressources, etc.
D’autres mesures, telles que les familles à faibles revenus (Royaume-Uni) ou les forfaits, sont également évoquées.
Le document souligne à juste titre la nécessité de reporter certaines réformes (France), évoque de nouvelles mesures visant à assouplir l’interaction avec les services publics de l’emploi (y compris en ligne) et signale d’autres mesures destinées à aider les ménages (assouplissement des loyers/hypothèques, report des factures de services publics, etc.)

Congés de maladie et responsabilités familiales

L’OCDE identifie trois dispositions relatives aux congés de maladie : (1) étendre la couverture des congés de maladie payés aux travailleurs atypiques, y compris les travailleurs indépendants.
(2) Allonger la durée des congés de maladie payés ou supprimer les périodes d’attente et les aligner sur la quarantaine et les recommandations médicales.
(3) Adapter les exigences en matière de déclaration pour permettre l’accès aux congés de maladie rémunérés, par exemple en supprimant la nécessité d’un certificat médical.
Il est bon que l’OCDE plaide clairement en faveur des congés de maladie rémunérés et souligne qu’ils « contribuent à ralentir la transmission du virus ».
L’OCDE souligne à juste titre l’absence de dispositions légales dans certains pays (États-Unis, Corée) et le fait qu’une couverture salariale complète ou une durée suffisante n’est pas assurée dans d’autres.
Il est positif que l’OCDE discute de la nécessité d’étendre la couverture aux travailleurs à temps partiel et à temps réduit et de leur exposition (car ils se trouvent dans le secteur des services).
Elle souligne l’absence de couverture dans certains pays (Australie), ainsi que les difficultés liées aux critères d’ouverture des droits et aux délais d’attente (en Italie, par exemple).
Le document aborde également les mesures spécifiques de congé de maladie pour les travailleurs en quarantaine.
À notre avis, il convient d’accorder une attention particulière aux travailleurs à bas salaires.
L’OCDE pourrait insister davantage sur la nécessité de garantir la sécurité de l’emploi et du revenu afin d’atténuer les pressions intenses exercées sur les travailleurs à bas salaires pour qu’ils continuent à travailler malgré la maladie.
Par ailleurs, les discussions sur les devoirs parentaux en cas de fermeture des écoles et des structures de garde d’enfants sont assez complètes et soulignent à juste titre les différentes configurations familiales (par exemple, les parents isolés).
Le document signale l’absence ou le manque de clarté des droits relatifs aux congés parentaux imprévus et la durée limitée de ces congés lorsqu’ils existent.
Le Portugal et la France sont identifiés comme les pays les mieux couverts en matière de prestations.
Peu de choses sont dites sur la possibilité de prendre un congé pour s’occuper d’autres membres adultes de la famille – ce qui, à l’heure actuelle, est plus important que jamais.

Télétravail

Les mesures visant à encourager le télétravail à plus grande échelle comprennent des subventions aux PME ainsi que des négociations et des conseils de la part des partenaires sociaux.
L’OCDE souligne la nécessité d’assouplir la protection du télétravail et de se passer de l’approbation préalable des syndicats ou, comme en Italie, de trouver un accord tripartite exceptionnel.
Elle mentionne à juste titre les conditions de logement et de connectivité comme un obstacle au télétravail.
Par conséquent, l’OCDE devrait veiller à ne pas s’appuyer trop lourdement sur des processus d’avantages liés uniquement à l’internet ou supposer que les travailleurs, dont la sécurité des revenus est remise en question ou qui font déjà partie de ménages à faibles revenus, continueront à s’offrir une couverture suffisante en matière de haut débit.
La fracture numérique était déjà réelle avant l’urgence de la Covid-19, et ses répercussions se font encore plus sentir aujourd’hui.