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Projet BEPS de l’OCDE pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale des entreprises : le TUAC publie une évaluation et des orientations

05 July 2016

Après la publication, en octobre 2015, de la version finale des mesures et recommandations de l’OCDE visant à lutter contre la planification fiscale agressive des grandes entreprises, venant clore la première phase du Plan d’action en 15 points contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (Base Erosion and Profit Shifting, BEPS) adopté par le G20 en 2013, c’est maintenant aux États de lancer la mise en oeuvre de ces mesures.
Pour aider les syndicats à suivre cette mise en oeuvre et, plus globalement, les conséquences de la planification fiscale des grandes entreprises, le TUAC publie une évaluation complète des 15 points du Plan d’action sur le BEPS (rapport complet disponible en anglais, résumé accompagnée d’une traduction française), ainsi qu’un document d’analyse et d’orientation spécifique sur le nouveau cadre de déclaration pays par pays (action 13 du Plan BEPS). Il publie également sa liste actualisée des « juridictions fiscales à risque ».

L’évaluation du TUAC décrit brièvement, pour chacune des 15 actions, le type de résultat attendu (rapport analytique, recommandation non contraignante ou norme minimale contraignante), ses avantages et ses inconvénients et son degré de pertinence estimé pour le monde syndical.

L’évaluation s’attache à déterminer si les mesures adoptées sont conformes aux résultats attendus et aux ambitions de ce projet lancé en 2013 par les gouvernements des pays du G20. Par rapport à la situation préexistante, l’ensemble de mesures adoptées à l’issue du Projet BEPS apporte des améliorations substantielles au système de règles fiscales et peut indéniablement être qualifié d’avancée historique au chapitre de la réglementation internationale. La barre n’était toutefois pas bien haute, puisque les règles fiscales internationales n’avaient guère évolué en près d’un siècle. Il reste à voir si le résultat final sera efficace pour empêcher l’évasion fiscale des entreprises, et dans quelle mesure.

L’évaluation du TUAC constate quatre manquements dans les rapports publiés en 2015 :

  • la non-prise en considération de la dimension unitaire des entreprises multinationales dans le traitement des transactions intragroupe (prix de transfert) ;
  • la concurrence fiscale toujours considérée comme une pratique vertueuse ;
  • une prise en considération insuffisante de la complexité accrue des règles fiscales ;
  • une adhésion excessive au principe de confidentialité des entreprises.

L’évaluation recense par ailleurs les mesures adoptées qui ont une grande pertinence au regard de l’activité syndicale, à savoir :

  • la révision des Principes de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert (actions 8, 9 et 10). La manipulation des prix de transfert au sein d’un groupe multinational est la pratique de planification fiscale agressive dont les syndicats devraient le plus s’inquiéter. Elle influe sur la répartition des bénéfices au sein du groupe multinational et a donc un impact sur la rémunération du personnel ainsi que sur les négociations collectives ;
  • le nouveau cadre de déclaration pays par pays (action 13). Les informations fournies dans les déclarations pays par pays et les documents connexes sur le calcul des prix de transfert donneront aux autorités fiscales une image complète et fiable de la localisation des sources de bénéfices et des actifs au sein du groupe. Aux termes des conditions négociées lors des travaux sur ce point d’action, le cadre déclaratif reste confidentiel. Les syndicats devraient donc s’efforcer d’obtenir l’accès à ces déclarations aux niveaux national, international et local (entreprise).

La pertinence de ce projet pour le monde syndical ne s’arrête pas aux questions de prix de transfert et de communication d’informations. L’évaluation du TUAC distingue d’autres résultats attendus qui présentent un intérêt pour les syndicats, à savoir :

  • les recommandations sur le traitement fiscal des intérêts déductibles (action 4). La déduction excessive d’intérêts de la base de l’impôt sur les bénéfices des sociétés est une technique classique de planification fiscale qui se répercute sur la répartition des bénéfices au sein d’un groupe multinational ;
  • les nouvelles règles contraignantes visant à empêcher les pratiques fiscales dommageables (action 5) par lesquelles les États mettent en place des régimes fiscaux préférentiels opaques (type « patent box », par exemple) pour attirer les actifs incorporels d’investisseurs étrangers, comme l’a révélé le scandale LuxLeaks ;
  • les conclusions du rapport sur les défis fiscaux posés par l’économie numérique (action 1) ; et
  • les six indicateurs élaborés pour mesurer et suivre le coût des pratiques de BEPS (action 11).

Outre l’évaluation des différentes mesures adoptées à l’issue du Projet BEPS, le TUAC publie aussi un document qui examine spécifiquement la norme de déclaration pays par pays objet de l’action 13 du Plan BEPS, comparant le résultat attendu aux régimes actuels de déclaration et militant pour la publication des déclarations pays par pays.

Enfin, le TUAC a actualisé sa liste des juridictions fiscales à risque, compilée à partir de trois sources : le Forum mondial de l’OCDE sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales, l’indice d’opacité financière du Tax Justice Network (TJN) et la liste des paradis fiscaux établie par l’UE.