Vue d’ensemble
Le rapport de l’OCDE « Objectif croissance », publié le 12 juillet 2019, est le rapport phare de l’organisation qui énumère les « quoi et quand réformer », comprenant plus de 150 pages de recommandations spécifiques à chaque pays.
L’édition 2019 souligne également comment une série de mégatendances telles que la mondialisation, la numérisation, l’évolution démographique et la dégradation de l’environnement modifient l’économie mondiale[i].
Sur le fond, le rapport semble s’inscrire dans la lignée des tentatives des dernières éditions de concilier la politique traditionnelle de « destruction créatrice » des réformes structurelles avec un modèle de croissance inclusive [ii].
The report proclaims the overall objectives of “stronger and fairer outcomes” and environmentally sustainable growth.
A new framework for selecting country-specific “top 5 reform priorities” using “a matching algorithm” is presented with four core pillars: productivity, employment, inclusiveness and environmental sustainability.
In the policy prescriptions, however, the report remains closely aligned with the priorities of previous editions: business competitiveness, enhancing productivity through greater competition, trade liberalisation, and labour market flexibility.
To incentivise businesses to invest more, the report argues, employer social contributions on labour and tax rates on corporate profits need to be cut, while trade liberalisation and reducing barriers to trade and investment will help lift growth.
There should also be a change in the tax policy mix, shifting the tax burden from corporate income to property, consumption and environmental taxation.
For TUAC, the ability of these limited set of policies to effectively drive inclusive growth and ensure fair distribution of wealth generated by growth and productivity gains is questionable.
Furthermore, the core message of the report concerns the willingness and capacity to reform faster and deeper.
With the economy facing further headwinds and economic growth continuing to slow, it calls on centres of government and top policy makers to accelerate the pace of reforms.
But will this come at the cost of social dialogue and meaningful consultations?
To be successful and owned, reforms needs more than communication teams and agile centres of government.
On labour and social affairs matters, they require meaningful consultations and negotiations with social partners, which in turn require strong labour market institutions.
Taking a closer look at the priorities and overall recommendations of the report, we can identify a number of central and more concerning themes.
Emploi et compétences
Alors que les taux d’emploi sont proches des niveaux d’avant la crise dans de nombreux pays (avec des exceptions notables, notamment la Grèce, l’Espagne, la France, l’Italie et la Turquie), le rapport admet, comme dans les publications économiques précédentes, que la qualité des emplois n’a pas suivi l’évolution de la quantité.
En Europe notamment, une part importante des nouveaux emplois sont des emplois à temps partiel involontaires ou des contrats à durée déterminée assortis d’une protection sociale limitée.
L’informalité reste importante dans la plupart des économies de marché émergentes.
Les réponses politiques à ces questions présentent un tableau mitigé.
Sur une note positive, le rapport appelle à une augmentation des investissements dans les compétences et des investissements publics dans les infrastructures.
En ce qui concerne les politiques de l’emploi, cependant, l' »inclusivité » est principalement considérée comme une question d’insertion professionnelle, en particulier pour les groupes défavorisés tels que les femmes et les immigrés, en promouvant l’égalité des chances par le biais des compétences et de la formation.
L’inclusion n’est pas replacée dans son contexte plus large, celui de l’équité et de la juste répartition des gains de productivité.
La réduction de l’écart entre les salaires et la productivité et la garantie de résultats plus équitables sur le marché du travail, comme le demande la Stratégie pour l’emploi de l’OCDE, ne sont pas abordées.
Pour réduire le dualisme du marché, le rapport suggère les vieilles recettes du passé : réduire les impôts sur les travailleurs à faible revenu, réduire la protection des travailleurs sous contrat régulier, rendre les salaires minimums plus flexibles, etc.
Plusieurs recommandations spécifiques à des pays vont dans ce sens (réduction du salaire minimum au Chili, affaiblissement de la négociation collective en Belgique), mais aucune n’appelle à l’augmentation du salaire minimum ou à l’élargissement de la négociation collective.
Le rapport promeut cette flexibilité du marché du travail et des salaires, ainsi que la mobilité des travailleurs (« Les travailleurs doivent avoir l’incitation et la possibilité de trouver un emploi de qualité »), tout en minimisant le dialogue social, les conventions collectives et le besoin urgent d’une transition juste pour les travailleurs.
Cette approche n’est pas conforme aux récentes prescriptions de la politique des perspectives d’emploi.
En d’autres termes, la cohérence au sein de l’OCDE n’est pas encore acquise.
Croissance verte
Nouveauté, l’édition 2019 du rapport Objectif croissance comprend un chapitre sur la croissance verte.
Avec cette inclusion, l’OCDE reconnaît que la croissance doit être durable sur le plan environnemental et propose plusieurs solutions politiques, notamment un déplacement de la charge fiscale.
Elle souligne en outre que la prise en compte des défis sociaux porte ses fruits.
Il est toutefois regrettable que l’OCDE n’aille pas jusqu’au bout et n’appelle pas explicitement à un « programme de transition » fondé sur les droits.
Il conviendrait d’établir un lien plus étroit avec les défis liés à la transition des travailleurs vers un avenir à faible émission de carbone et avec un programme d’investissement public plus large.
Pour le TUAC, il est essentiel que l’interaction avec la productivité et l’emploi soit mieux prise en compte.
Il exhorte l’OCDE et les gouvernements à appliquer les principes de la transition juste dans leurs efforts de lutte contre le changement climatique et la dégradation de l’environnement, en gardant à l’esprit les effets des politiques climatiques sur les travailleurs, leurs communautés et leurs familles.
En ce sens, le rapport 2019 d’Objectif croissance représente malheureusement une occasion manquée pour l’OCDE d’établir un programme plus ambitieux pour une croissance inclusive et durable.
Accélérer le rythme des réformes – au détriment du dialogue social ?
L’OCDE exhorte les gouvernements à accélérer le rythme des réformes, citant la France comme un exemple de bonne pratique.
Il est frappant de constater que l’OCDE continue d’exhorter les gouvernements à accélérer encore le rythme des réformes, sans vraiment tenir compte d’un dialogue social constructif.
En appelant à « aller plus vite », les pays de l’OCDE courent le risque de « bombarder » l’agenda politique de réformes rapides qui ne permettent pas aux partenaires sociaux de jouer leur rôle important, une stratégie qui va à l’encontre de la réalisation de bonnes normes sur le marché du travail et qui risque de provoquer une réaction négative de la part de l’opinion publique.
Le TUAC invite donc les gouvernements et l’OCDE à faire preuve de prudence et à ne pas procéder à des réformes précipitées et mal planifiées, mais plutôt à des réformes opportunes qui incluent la contribution substantielle des partenaires sociaux et qui réduisent la détresse économique et sociale, fournissent de meilleurs résultats institutionnels et abordent les préoccupations liées au climat et à l’environnement.
Les événements récents en France appuient précisément ce point de vue. [ i] http://www.oecd.org/economy/going-for-growth/ [ii] Objectif croissance 2018 : Entre réformes structurelles et croissance inclusive 21 mars 2018 https://tuac.org/news/going-for-growth-2018-between-structural-reforms-and-inclusive-growth-2/ & Going for growth and inclusiveness ?
17 mars 2017 https://tuac.org/news/going-growth-inclusiveness/